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Sur la nef des fous,
capitaines sans casquettes,
marins des mornes conquêtes,
vous perdez la tête.
Sur la nef des fous
aux lucarnes de caserne
vos yeux plats, drapeaux en berne
dorment dans leurs cernes.
Vous cherchez le Nord
aux étoiles qui vous mentent
comme Orphée, jouant du cor,
cherche son amante
lorsque les âmes trop lentes
ont perdu leur corps. |
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Nef, ô nef des fous,
cathédrale bafouée
tu gard’ à ton corps, nouées,
de lourdes bouées.
C’est , ô nef des fous,
la faillite et le scandale
quand starlette ou cardinal
prenn’ du gardénal…
ou bien c’est l’amour
qui fait rir’ comme aux galères,
joli tissu de velours
qui cache un ulcère :
le temps des lilas se perd
au son du tambour ! |
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C’est la nef des fous
au barreur décapité
quand les ourses ont quitté
notre Voie Lactée.
Sur la nef des fous
les boussole sont dissoutes,
l’ancre molle dans la soute
coule goutte à goutte ;
trop tard les marins
accrochés à leurs béquilles
ont donné leur foie leurs reins
et perdu leurs billes,
ils n’ont pas gagné la quille
où dort l’or du Rhin. |
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Car la nef des fous,
c’est notre terre en déroute,
c’est notre Chili sans doute,
c’est notre Beyrouth.
Folle nef des fous,
que fais-tu si loin du quai,
fallait-il qu’u tourniquet
nous fum’s embarqués ?
Trop tard ! devant nous
le Maëlstrom ne peut attendre :
dans l’eau pure ou dans la boue
il faudra descendre
et laisser notre scaphandre
sur la nef des fous ! |
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